Quand Perl distribua la Vixen Halley 70 en 1985 en France via sa société Medas à Vichy, la comète de Halley faisait la une des magazines.

Cette petite lunette japonaise, avec son objectif de 70 mm et sa focale courte de 400 mm, a été conçue pour ce moment historique. Quarante ans plus tard, elle porte encore fièrement son nom : un instrument né pour suivre les visiteuses chevelues du Système solaire.

Lemmon, une comète inattendue
Cela faisait un bon moment que j’attendais de pouvoir l’observer. Par expérience, je sais qu’il est illusoire d’espérer voir une comète depuis la région parisienne : trop de lumière, trop d’humidité, trop d’atmosphère entre nous et le ciel. Ma chance se jouerait donc pendant les vacances, dans le sud-ouest, près de l’océan, sous un ciel Bortle 4.
La météo, elle, n’était pas vraiment de cet avis. Entre les rafales de la tempête Benjamin et les averses imprévisibles, j’avais presque renoncé. Et puis, hier soir, une brève éclaircie ! Un de ces moments magiques où, juste après une grosse averse, le ciel devient limpide, lavé de toute brume.

La comète, en revanche, jouait la discrète : basse sur l’horizon, au-dessus d’Arcturus. Il fallait donc un horizon parfaitement dégagé. Je vois la grosse étoile derrière les arbres, il va falloir ruser… C’est là que la Perl Halley 70 montre tout son avantage. Légère, vive, elle se transporte sous le bras avec ma monture Pronto en version allégée. J’ai emmené la lunette jusqu’au parking de la résidence, seul endroit dégagé à portée. Tant pis pour le lampadaire, il fallait faire vite avant que les nuages suivants n’envahissent le ciel.
Je vise Izar, puis un léger virage à gauche à l’oculaire de 20 mm, qui offre un beau champ large de 3° et la voilà ! Comète Lemmon trouvée. Un objet un peu diffus, on pourrait croire à un amas globulaire ou une nébuleuse, mais en regardant plus attentivement, on voit la boule coma avec sa belle queue bien longue qui se dirige vers le bas.

Sous un ciel sombre, on retrouve cette impression magique que la lunette a été faite pour ça : capter le halo fragile des comètes, ces nuages de glace et de poussière qui traversent le vide à des millions de kilomètres de nous.
Comète Lemmon
La comète C/2025 A6 (Lemmon) a été découverte le 3 janvier 2025 par l’équipe du Mount Lemmon Survey, un programme américain de recherche de géocroiseurs situé près de Tucson, en Arizona. Ce réseau d’observation, rattaché à l’Université d’Arizona, utilise un télescope de 1,5 m de diamètre installé sur le Mount Lemmon, dans la chaîne des Santa Catalina Mountains.

La découverte a été faite dans le cadre de la surveillance systématique du ciel pour détecter les objets proches de la Terre (astéroïdes, comètes). L’objet repéré présentait une petite coma diffuse, signe évident d’une activité cométaire. Après confirmation par d’autres observatoires, il a reçu la désignation C/2025 A6 (Lemmon) :
- C/ indique une comète non périodique (ou à très longue période).
- 2025 A6 précise qu’elle est la sixième comète découverte dans la première quinzaine de janvier 2025.
- Lemmon fait référence à l’observatoire de découverte.
Les premières observations ont montré qu’il s’agissait d’une comète à longue période, venue des confins du nuage d’Oort, cette immense sphère hypothétique de débris glacés entourant le Système solaire. Elle mettrait environ 1 350 ans à revenir vers le Soleil.
Son orbite très allongée l’amène à passer à 0,53 UA du Soleil (soit environ 79 millions de kilomètres) au périhélie prévu pour le 8 novembre 2025. Lors de son passage près de la Terre, autour du 21 octobre 2025, elle devait atteindre une magnitude proche de +4 à +5, la rendant visible aux jumelles et aux petites lunettes astronomiques sous un ciel sombre.
Ce qui rend Lemmon intéressante, c’est sa coloration verdâtre bien marquée, due aux émissions du carbone diatomique (C₂) dans sa coma — un phénomène typique des comètes actives.
C’est la deuxième comète que j’ai pu observer avec ma Perl Halley 70. L’année dernière, à la même période, j’avais eu la chance de pointer 3D/Atlas le temps d’une seule soirée : une très belle comète, encore plus brillante et évidente que Lemmon.

