Hier, j’ai remarqué que ma lunette de 60 mm donnait un meilleur résultat sur Saturne que ma 90 mm ! Pourquoi ? On croit souvent qu’un gros télescope montre toujours plus de détails. En réalité, ce n’est vrai que lorsque l’atmosphère le permet. La turbulence, ou seeing, joue un rôle décisif : elle fixe le grossissement réellement exploitable et la finesse des détails que l’on peut observer.
Qu’est-ce que le seeing ?
Le seeing correspond à la turbulence atmosphérique. L’air, chauffé et refroidi de manière inégale, forme des cellules qui déforment les fronts d’onde lumineux venus des étoiles. Résultat :
• les étoiles scintillent,
• les planètes dansent,
• les détails fins disparaissent.
Les astronomes utilisent la longueur de Fried (r₀) pour quantifier ce phénomène : c’est la taille moyenne d’une cellule d’air turbulent.
- Si le diamètre du télescope (D) est plus petit que r₀, il « reste dans une cellule » → image stable, mais limitée en résolution.
- Si D > r₀, le télescope capte plusieurs cellules → les détails sont brouillés par la turbulence.
En France, r₀ est généralement compris entre 5 et 15 cm, ce qui correspond à un seeing de 1 à 2″ la plupart du temps.
Pour connaitre votre seeing actuel, RDV sur Meteo Blue à la 5ᵉ colonne (1.42). Il change toutes les heures. La 2eme colonne verte (3) donne la qualité pour le planétaire, le meilleur étant à 5. La 1ʳᵉ colonne est pour le ciel profond, la transparence du ciel (5).
Donc pour faire du planétaire exceptionnel, il nous faut <1, 5-5 et sans nuages 😉
0-0-0, <1, 5-5

Diamètre et seeing : théorie
Le pouvoir séparateur théorique d’un instrument est donné par :

- 60 mm → 2″
- 90 mm → 1,3″
- 200 mm → 0,6″
- 400 mm → 0,3″
Mais si le seeing est de 1,5″, tous les instruments sont bridés à cette valeur. La différence, c’est que le petit diamètre donne une image plus stable, tandis que le grand diamètre, sensible à plus de cellules, semble « danser » davantage.
Table r₀ ↔ seeing ↔ diamètre recommandé

Témoignage pratique : un Dobson de 400 mm

Un membre de mon club résume parfaitement l’effet du seeing avec son Dobson 400 mm :
• 15 mm (121×) → passe toujours.
• 9 mm (200×) → passe souvent.
• 7 mm (260×, pas dans sa mallette) → serait le sweet spot, le plus utile la plupart du temps.
• 5 mm (365×) → n’est utilisable que lors de nuits rares et très calmes.
👉 Cela signifie que, malgré un potentiel théorique de 800×, un 400 mm est en pratique limité la plupart du temps à 200–260×, à cause du seeing.
Retrouvez le grossissement utile de votre télescope avec mon application.
Grossissements utiles selon diamètre et seeing

Planétaire vs ciel profond
Planétaire / Lune → seeing = facteur limitant. Une 60 mm peut parfois paraître meilleure qu’une 200 mm si l’air est turbulent.
Ciel profond → seeing moins important. Ce qui compte, c’est la collecte de lumière. Un 400 mm montrera toujours bien plus de galaxies ou de nébuleuses qu’une 60 mm, même si les étoiles paraissent un peu gonflées.
Conclusion
- Une 60 mm est toujours agréable : elle reste dans les limites du seeing, même médiocre.
- Un instrument de 90–150 mm commence à profiter du ciel quand il se calme, tout en restant stable la plupart du temps.
- Un 200 mm et plus offre un gain énorme, mais seulement quand l’atmosphère coopère.
- Un 400 mm montre son vrai potentiel uniquement lors de nuits exceptionnelles : la récompense est alors spectaculaire.
En astronomie, le diamètre donne le potentiel, mais c’est l’atmosphère qui décide du résultat.

